La méthode des 6 chapeaux

Edward de Bono publie en 1985 un ouvrage intitulé « Six thinking hats ». Ce psychologue, philosophe, physicien et spécialise des sciences cognitives s’était fait remarquer plus tôt en 1967 en développant le concept de pensée latérale. Grossièrement, la pensée latérale est définie par de Bono comme une approche du raisonnement différente de la voix verticale traditionnelle, où se succèdent des étapes logiques dans la résolution d’un problème.

Un exemple populaire qui l’a conduit à élaborer cette idée est le jugement du Roi Salomon. Dans la Bible, le Roi Salomon doit rendre la justice dans un conflit opposant deux femmes prétendant chacune être la mère d’un enfant. Il propose de couper l’enfant en deux afin d’en remettre une moitié à chaque femme. Cette proposition choquante permet de révéler par la réaction qu’elle suscite la vraie mère de l’enfant, qui implore le roi d’y renoncer et accepte de remettre l’enfant à sa rivale.

Cet exemple emprunté à la Bible révèle le fondement de son concept : raisonner sur une problématique sans emprunter les chemins habituels qu’il appelle verticaux (arguments logiques, itératifs, construction à étape) pour choisir un angle différent qu’il appelle latéral.

Revenons à l’ouvrage « Six Thinking hats ». Il y promeut une méthode censée augmenter l’intelligence collective en améliorant l’efficacité du groupe.

De Bono remarque que des personnalités similaires vont avoir tendance à s’engager et se soutenir dans des cheminements argumentatifs communs. Il déduit six directions dans lesquelles le cerveau peut « pousser » une stratégie argumentative ou une tactique de raisonnement.

L’idée qui lui vient alors suppose de « radicaliser » les approches cognitives des membres du groupe. A partir des six directions qu’il a envisagé, il définit six personnalités que chaque membre du groupe devra incarner à la manière d’un jeu de rôle.

Il symbolise les personnalités à partir de chapeaux qui sont autant traits de caractère exagérés à dessein :

Chapeau bleu : il considère chacune des données du problème, il construit ses arguments sur une vue générale, et endosse un rôle d’animateur

Chapeau rouge : il se fie à ses sentiments et ses émotions, il raisonne à partir de ceux-là en proposant un raisonnement très intuitif dont la consistance des arguments n’a pas besoin d’être justifiée

Chapeau noir : il ne voit que les arguments en défaveur, c’est l’objecteur systématique qui exagère les dangers, les risques, les « raisons de ne pas y aller ».

Chapeau blanc : il raisonne peu et présente les faits objectifs, les informations sourcées, il est méthodique et minutieux mais assume d’être neutre dans le débat

Chapeau jaune : il ne voit que les arguments à faveur, c’est l’optimiste forcené qui accepte de rêver un peu

Chapeau vert : il raisonne hors-piste, c’est le champion de la pensée latérale, il est créatif et cherche des solutions innovantes.

La méthode a été baptisée pensée parallèle. En augmentant artificiellement la place d’une stratégie de raisonnement, on crée les conditions d’une pensée originale. En groupe, c’est la cohabitation de chacun des caractères singuliers qui profite à l’intelligence collective à deux titres :

• L’exercice favorise la pensée latérale chez chacun des individus et l’intelligence collective se construit par la confrontation d’arguments de chaque individu endossant un rôle connu de chacun.
• Le jeu de rôle a un effet désinhibiteur qui favorise l’expression d’une pensée singulière dont on hésitera à prêter la paternité à l’individu ou au rôle joué par l’individu.

La méthode semble valable pour des petits groupes, l’une des vertus de l’exercice étant alors de palier l’absence (ou la faible) hétérogénéité des caractères.

Un autre enseignement que nous pouvons tirer de cette méthode, c’est que la confrontation d’argument produit de l’intelligence collective si la diversité des individus est suffisante. Ici, elle l’est artificiellement.

Dans les grands groupes, quand le nombre d’individus augmente significativement (et rend pratiquement impossible l’organisation d’ateliers tels que décrits par de Bono), nous pouvons postuler que la diversité augmentera en même temps que la taille du groupe. C’est-à-dire que plus le nombre d’individus augmente, plus la probabilité d’avoir des représentants « naturels » de chacun des chapeaux augmente. Cela rappelle les conditions posées par James Surowiecki dans son ouvrage La Sagesse des Foules (Nous avons déjà écrit à ce sujet).

La boucle est bouclée ! Le concept de pensée latérale mis en jeu dans la méthode des six chapeaux, rappelle que la pensée collective n’est que plus fertile quand la diversité des individus augmente, et bien donc souvent quand leur nombre augmente. En ceci, les outils numériques sont précieux : pour les petits groupes comme support, et pour les grands groupes par nécessité.

Les outils de mobilisation de l’intelligence collective sont nombreux. Le numérique est un facilitateur et Quaeso apporte une solution pour les organisations soucieuses de faire émerger l’intelligence de leur groupe. Les équipes de Quaeso sauront le cas échéant apporter leur expertise pour vous permettre de mener à bien tous vos projets d’intelligence collective.

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